MEDIAKWEST - Entretien autour du Live multi-cam avec Stéphane Cailleton
Visual Impact est présent depuis longtemps sur la prise de vue grand capteur, avec les caméras Sony, puis Arri, que ce soit en super 35 ou en Full Frame. Stéphane Cailleton est responsable technique pour la partie prestation multi-caméra chez Visual Impact, il nous présente son parcours et les particularités de la réalisation avec des caméras grands capteurs.
Mediakwest : Comment avez-vous commencé ?
Stéphane Cailleton : J’ai commencé la prise de vue multicaméra dans les années 90 avec des régies analogiques et des caméras Betacam pour le secteur de l’institutionnel, puis pour la télévision. En 2006, lors de mon arrivée chez Visual Impact, j’ai commencé à utiliser le mélangeur Anycast de Sony qui était radicalement différent de ce qu’il y avait sur le marché. L’Anycast est un mélangeur compact et simple d’usage. Cela m’a relancé vers le multicaméra avec de nombreuses émissions en Afrique autour du sport.
M. : À quel moment vous êtes-vous intéressé au grand capteur ?
S.C. : La vidéo, avec les appareils photo numériques, a révolutionné le marché, apportant une nouvelle imagerie, mais comme je suis de la vieille école, cela me posait problème de ne pas avoir une véritable caméra. Je n’étais pas fan d’un appareil photo qu’il fallait accessoiriser. J’attendais que les constructeurs sortent des caméras avec de grands capteurs. Le lancement par Sony de ses premiers modèles avec des capteurs Super 35 mm comme la PMW-F3 et la Sony PXW-FS5 ont fait avancer les choses. Il était possible mettre des optiques cinéma dessus, même si ce n’était pas simple. Toutefois, il y avait deux mondes qui se confrontaient, celui du cinéma et celui du broadcast. Les équipes n’étaient pas les mêmes, les temps de préparation non plus. Les contraintes de la télévision où il faut tourner vite et être prêt à tourner en quelques minutes ont bouleversé les choses. Chez Visual Impact nous avons eu les premières demandes de tournage grand capteur vers 2015. Nous n’avions pas forcément suffisamment de modèles identiques de caméra, il fallait mélanger les modèles, ce qui au résultat ne donnait pas une image satisfaisante et posait des problèmes de postproduction. Visual Impact a décidé d’investir massivement dans un parc de caméras Sony PMW F-55 pour pallier ce problème d’uniformité et cela a vraiment décollé. L’autre évolution fut la commercialisation par Fujinon de la gamme Cabrio qui permettait d’avoir des optiques compatibles avec les caméras grand capteur. Ces objectifs s’installent très rapidement, il n’y a plus qu’à mettre les reports de zoom et cela marche ! L’arrivée d’Arri sur le marché avec le modèle Amira fut une autre étape importante, apportant un look encore différent et très cinématographique qui a tout de suite plu.
M. : Quelle fut votre première expérience avec les caméras Arri ?
S.C. : Visual Impact avait deux caméras Arri Amira et je travaillais avec un réalisateur depuis plusieurs années pour des réalisations multicaméras à qui j’ai proposé de faire une captation avec des caméras Arri. Ce réalisateur travaillait beaucoup pour Florence Foresti et je lui ai proposé de faire une captation avec les deux caméras Arri Amira. Nous avons filmé le spectacle, nous lui avons donné les rushes et le lendemain il m’a rappelé en me disant qu’il ne voulait plus tourner qu’avec ce genre de caméras. L’année suivante, nous avons fait la première captation pour le spectacle de Florence Foresti avec un mix de caméras, à la fois des modèles broadcast Sony PMW400 et quatre modèles Arri Amira. Lors de la postproduction, ce sont principalement les images de l’Amira qui ont été utilisées
et uniquement les images de la PMW-400 qui était sur la grue. Fujinon et sa gamme de Cabrio a permis d’équiper plus facilement de différentes focales les caméras grand capteur. En 2019, nous avons fait la captation du spectacle de Blanche Gardin Bonne nuit Blanche et nous nous sommes associés avec AMP Visual TV qui fournissait tous les moyens techniques qui vont derrière la caméra comme le réseau d’ordre, la gestion des flux audio-vidéo. Le tournage a été réalisé avec des modèles Arri Alexa Mini et Amira. La diffusion était en direct pour les salles Pathé avec Pathé Live. Ce fut l’un des plus gros succès pour ce type de diffusion avec presque 100 000 spectateurs présents dans les salles.
M. : Quelles sont les différences majeures entre un tournage avec des caméras broadcast et grand capteur ?
S.C. : Par rapport à une caméra plateau qui est de type plug and play où on branche la fibre et c’est bon, une captation grand capteur nécessite du temps d’installation. Tout est en kit et il faut donc accessoiriser la caméra. Il faut ajouter le dock fibre qui se fixe sur la caméra qui renvoie vers la régie, soit pour faire une réalisation en direct soit pour faire juste le monitoring avec le réseau d’ordre. Il faut ajouter un viseur et pour notre part nous utilisons principalement du TV Logic (du 5 au 9 pouces). Il faut parfois travailler avec des assistants caméras pour faire le point. Tout dépend de l’artiste ou du type de captation. Lorsque les artistes bougent en permanence, et qu’il faut se placer loin de la scène, il faut un assistant pour faire le point. Dans des grandes salles comme Pleyel ou l’Olympia il faut mettre des optiques B4 2/3 de pouce sur les caméras Arri, et Sony en utilisant des bagues d’adaptation et utiliser par exemple le modèle 46x 4K de Fujinon qui dispose, de plus, d’une stabilisation optique.
M. : Quelles sont les demandes des clients ?
S.C. : Ce que veulent les clients c’est avoir une image différente, un accompagnement, des conseils personnalisés. Lors de la réalisation, les clients veulent voir toutes les caméras sur un seul écran, pouvoir communiquer avec les cadreurs. Nous sommes prêts à l’heure et disponibles toute la journée pour que tout se passe bien, y compris lors du démontage. Les clients nous font confiance, et il faut être rigoureux sur le choix du matériel. Nous mettons tout en œuvre pour livrer un programme de qualité.